22/04/2009
HADOPI : risque de « bug » européen ?
C'est désormais une habitude : après le vote des députés rejetant le projet de loi HADOPI le 9 avril dernier, le Président de la République revient à la charge. Bouleversant le calendrier des travaux de l’Assemblée, l’UMP a ainsi imposé un réexamen du texte dès le 29 avril, le débat pouvant se prolonger, si nécessaire, les 4 et 5 mai. Une obstination dont les conséquences pourraient bien dépasser le strict cadre national...
En effet, par les hasards des calendriers parlementaires, les députés européens travaillent actuellement à la finalisation du paquet Telecom, vaste réforme visant à améliorer la concurrence dans le marché des télécommunications. Le texte ne devait pas se préoccuper des contenus ni du téléchargement, jusqu’à ce que plusieurs députés de droite profitent de l’occasion pour tenter de faire valider par le Parlement Européen le principe de la riposte graduée (voir les articles précédents au sujet du projet HADOPI). En réaction à cette tentative, les parlementaires européens ont, par une large majorité, adopté hier un amendement au paquet Telecom qui stipule qu’aucune restriction ne peut être imposée aux droits et libertés des utilisateurs finaux sans décision préalable des autorités judiciaires. Une conception que je partage et qui s’oppose au projet de loi que le Gouvernement s’apprête à présenter de nouveau à l’Assemblée Nationale.
Le paquet télécom, dont la députée européenne socialiste Catherine Trautmann est l’un des rapporteurs, doit être entériné par le Parlement Européen et le Conseil de l’Europe (qui réunit les gouvernements de l’Union). Son adoption contraindrait la France à abandonner la riposte graduée. Aussi, beaucoup de collègues parlementaires européens craignent de voir Nicolas Sarkozy se lancer dans un bras de fer avec les instances de l’Union pour rejeter cet amendement, au risque de retarder l’adoption du texte dans son ensemble, fruit de plusieurs mois de discussion.
Ne pas respecter les volontés des eurodéputés constituerait un signe particulièrement inquiétant à moins de deux mois des élections au Parlement Européen. Les députés socialistes se chargeront de le rappeler à l’Assemblée Nationale et dénonceront un projet de loi HADOPI inefficace, toujours aussi dangereux et déjà obsolète.
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03/04/2009
HADOPI adoptée : Tout faux !
Le projet de loi Création et Internet a été adopté hier soir, sans grande surprise, à l’Assemblée Nationale. La France devient donc le premier pays à instaurer légalement la riposte graduée, et à permettre à une autorité indépendante (HADOPI) de sanctionner les citoyens en coupant leur accès Internet.
Ce texte est pourtant techniquement inapplicable et risque de générer d’importantes erreurs dans la mesure où il pourra être facilement contourné et manipulé. Nombreux sont en effet les internautes qui connaissent déjà le moyen de crypter les fichiers échangés et, plus grave, les vrais pirates sont passés maîtres dans l’art de se servir de l’adresse IP d’un autre internaute pour télécharger illégalement. C’est aussi une véritable usine à gaz (il est prévu que 300 000 personnes reçoivent chaque mois un avertissement !) qui risque de coûter cher à l’Etat sans pour autant (quoique ce soit l’objectif affiché) rapporter un euro de revenu supplémentaire aux artistes et à la création culturelle. Enfin, la disposition clef du texte, la coupure de l’abonnement internet, va à l’encontre de positions récentes prises par l’Union Européenne (qui estime qu’elle « viole le droit à l’éducation des personnes »).
Une loi « absurde », donc, comme l’a dit et répété mon collègue Patrick BLOCHE alors que d'autres solutions existent (voir note précédente sur le sujet).
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16/03/2009
Projet de loi HADOPI: La majorité pas très "net"
Le projet de loi (bien mal nommé) « Création et Internet » censé lutter contre le téléchargement illégal suscite depuis plusieurs semaines des réactions passionnées d’internautes qui, nombreux, m’ont fait part de leur opposition à l’esprit (« rétrograde ») et aux dispositions (« liberticides ») de ce texte. Je partage assez largement leurs accusations et leurs inquiétudes. Ce texte m’apparaît effectivement constituer une atteinte certaine aux libertés fondamentales sans par ailleurs apporter de réponse crédible aux besoins de financement des créateurs, question pourtant à l’origine (tout au moins selon le discours officiel) du dernier projet de la Ministre de la Culture.
Le texte s’inscrit dans la continuité de l’illusion répressive introduite par la loi DADVSI de 2006 qui prévoyait déjà des verrous numériques pour les œuvres et des sanctions pénales pour les internautes. Malgré l’échec déjà constaté de ces mesures, le Gouvernement persiste dans cette voie en cherchant à imposer le principe de « riposte graduée » qui recouvre en fait un nouveau dispositif d’avertissement et de sanction pour les internautes « pirates » (c'est-à-dire qui téléchargent des œuvres culturelles sur le web, ce qui est à ce jour illégal) pouvant aller jusqu’à la coupure de l’accès internet.
Les motifs sont multiples qui me conduisent à rejeter ce projet de loi : surveillance généralisée du net, absence de recours et de procès équitable avant coupure, identification hasardeuse des « coupables ». Mais surtout, ce dispositif, parce qu’il est d’ores et déjà condamné à être dépassé par les constants progrès technologiques dans ce domaine, n’apporte aucune garantie de revenu supplémentaire aux auteurs. Autant de raisons qui nous amènent, avec mes collègues socialistes, à nous dresser contre ce projet à la fois disproportionné, inefficace et dangereux. Quant à la question du financement de la création culturelle, nous considérons que d’autres solutions sont à portée de main, si l’on accepte de sortir d'une logique exclusivement répressive et de reconnaître le progrès que constituerait la mise à disposition gratuite et illimitée des contenus culturels, pour peu qu'elle fasse l'objet d'une contrepartie équitable. C’est le principe, que nous défendons, de la « contribution créative », système inspiré de la redevance dans lequel une part de l’abonnement internet viendrait contribuer au financement de la création culturelle, les sommes prélevées étant réparties selon le principe des droits d’auteurs, entre producteurs, auteurs, éditeurs, etc.
L’examen de ce projet de loi a débuté la semaine dernière à l’Assemblée Nationale et s’est déroulé dans un climat tendu et par ailleurs assez détestable. Après deux jours de discussion, le débat a en outre été suspendu et renvoyé au 31 mars. A suivre, donc.
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